La prophétie de Siméon (Luc 2.21-35)

Publié le 1 Mars 2024

La prophétie de Siméon (Luc 2.21-35)

Au début de l'histoire de l'Église, des interrogations ont émergé concernant la figure de la Vierge Marie. Les premiers siècles, marqués par des périodes de persécution, ont rendu difficile la rédaction d'écrits détaillant les enseignements apostoliques. Malgré cela, certains documents authentiques nous sont parvenus, apportant leur contribution à la foi des chrétiens.

À cette époque, les notions du péché originel et de la divinité du Christ n'étaient pas encore clairement formulées. Cependant, c'est à partir de ces concepts que les réflexions sur la Vierge Marie ont commencé à émerger. Des questions telles que "Marie est la mère de Dieu, donc elle ne peut être soumise au péché" ou "Marie est issue de l'humanité, donc elle ne peut être exempte de péché" ont commencé à se poser.

Bien que l'Immaculée Conception en germe soit inscrite dans les Ecritures, que Marie Immaculée voire presque co-rédemptrice soit professée dès les débuts de l'Eglise, aujourd'hui encore, certains protestants réformés occultent ces nuances préférant prendre appui uniquement sur ce qui convient à leur idéologie. Ce qui est sommes toute regrettable !

  • Dans un premier temps, nous évoquerons l'interprétation d'Origène, qui considérait que la prophétie de Siméon révélait un doute, un scandal dans l'esprit de la Vierge Marie, la présentant ainsi sous un jour peu favorable. Cependant, cette interprétation a été abandonnée dès le Vème siècle.
  • Ensuite, nous explorerons les différentes interprétations contemporaines de celle d'Origène concernant cette prophétie.
  • Enfin, nous approfondirons cette piste qui nous conduira vers un paradigme plus plausible en ce qui concerne la Vierge Marie.
Le doute et le scandale (Origène, abandonné à partir du V° siècle)

 

Certains protestants se réfèrent à Origène, suivi par un certain nombre de pères de l'Église de son époque, pour avancer l'idée que Marie aurait été pécheresse. Dans son commentaire de l'Évangile de saint Luc, il écrivait :

Origène, Homélies sur S. Luc, XVII, 6-7 : "Siméon dit ensuite : Un glaive te transpercera l’âme à toi aussi. Quel est ce glaive qui a transpercé le cœur des autres et également celui de Marie ? L’Écriture dit clairement qu’au temps de la Passion, tous les Apôtres ont été scandalisés au sujet du Christ. Le Seigneur même l’a dit : Tous vous serez scandalisés cette nuit. […] Pourquoi penser que, si les Apôtres ont été scandalisés, la mère du Seigneur, elle, a été préservée du scandale ? Si, pendant la Passion du Seigneur, elle n’a pas été sujette au scandale, Jésus n’est pas mort pour ses péchés, mais si tous ont péché et sont privés de la gloire de Dieu, si tous sont justifiés et rachetés par sa grâce, Marie aussi fut à ce moment-là sujette au scandale."

Loin d'être définitive, cette citation de l'exégète nous livre en réalité un doute qui traversait alors l'Eglise :

"Pourquoi penser que, si les Apôtres ont été scandalisés, la mère du Seigneur, elle, a été préservée du scandale ?"

Nos frères réformés empressés d'entacher la Vierge Marie négligent la question légitime soulevée par Origène  : "Pourquoi penser (..) que Marie a été préservée du scandale?" Mais surtout, qui le pensait alors ? Cette interrogation met en lumière les diverses perspectives théologiques qui émergeaient autour de la figure de la Vierge Marie à cette époque. Origène s'adresse à ceux qui croient que Marie a été préservée du scandale et qui interprètent la prophétie de Siméon différemment. Mais poursuivons notre exploration à la suite d'Origène et de ses questionnements, en nous intéressant à Basile de Césarée.

Basile de Césarée  Épître 260 IX :  Par glaive, il faut entendre la parole qui éprouve et juge nos pensées, qui pénètre jusqu’à la division de l’âme et de l’esprit, des jointures et des moelles, et qui discerne nos pensées. Or, à l’heure de la Passion, chaque âme a été soumise, pour ainsi dire, à une sorte d’examen. Selon la parole du Seigneur, il est dit : Vous serez tous scandalisés à cause de moi (Matthieu 26, 3). Siméon prophétise donc sur Marie elle-même que, se tenant près de la croix, voyant ce qui se fait, et entendant les voix, après le témoignage de Gabriel, après sa connaissance secrète de la conception divine, après cette grande démonstration de miracles, elle sentira dans son âme une violente tempête. Le Seigneur devait goûter à la mort pour tout homme, faire la propitiation pour le monde et justifier tous les hommes par son propre sang. Toi-même, qui as été instruit d’en haut des choses concernant le Seigneur, tu seras atteint par quelque doute. Telle est l’épée. Afin que les pensées d’un grand nombre de cœurs soient dévoilées. Il indique qu’après l’offense à la Croix du Christ, une guérison rapide viendra du Seigneur aux disciples et à Marie elle-même, confirmant leur cœur dans la foi en Lui. De la même manière, nous avons vu Pierre, après avoir été humilié, s’accrocher plus fermement à sa foi en Christ. Ce qu’il y avait d’humain en lui s’est avéré fragile, afin que la puissance du Seigneur puisse être démontrée.

Cette idée d'Origène a exercé une grande influence à son époque et a été adoptée par plusieurs de ses contemporains. Cependant, le scandale d'Origène a été discrètement abandonné un siècle plus tard. 

L'une des dernières traces que nous trouvons de cette interprétation se situe dans les écrits de saint Augustin. 

Ou bien enfin, peut-être veut-il signifier que Marie elle-même, par laquelle s'est accompli le mystère de l'incarnation, a eu à la mort du Seigneur, et sous l'impression de la douleur comme un moment de doute et d'hésitation, en voyant le Fils de Dieu réduit à ce degré d'humiliation qui le faisait mourir sur une croix. Et de même qu'un glaive qui ne fait qu'effleurer un homme, lui donne un vif sentiment de crainte, mais sans le blesser; ainsi le doute lui inspira un vif sentiment de tristesse, mais sans donner la mort, parce qu'il ne s'arrêta pas dans son âme, mais la traversa seulement comme une ombre. (Catena Aurea) (Quest. sur l'Anc. et le Nouv. Test., chap. 73)

On peut aisément remarquer toutes les précautions prises par l'évêque d'Hippone après les conciles de Nicée, de Constantinople et d'Éphèse, qui n'ont pas été portés à la connaissance d'Origène puisqu'ils sont survenus plus tardivement, après sa mort. Ce détail est important à souligner. Cependant, comme nous le découvrirons plus tard, Saint Augustin n'apporte pas ici une conclusion définitive à cette question.

Pour commencer, examinons les Pères et les Docteurs de l'Église qui, à l'époque d'Origène, ne partageaient pas la même interprétation.

Le problème posé par St Ephrem

 

Comme nous le verrons ultérieurement, St Ephrem  fut un fervent défenseur de la Vierge Marie, mais certaines de ses positions peuvent paraître étranges dans cet ouvrage. Tout comme Origène, il évoque l'idée du "doute" sans toutefois mentionner de "scandale". Cependant, concernant le "doute" il confond la Vierge Marie avec Marie Madeleine.

"Siméon dit également : Tu écarteras le glaive ; ce glaive qui défendait le paradis à cause d’Ève a été enlevé par Marie. Ou bien : « Tu écarteras le glaive », c’est-à-dire la négation. Or le grec dit clairement : Les pensées intimes d'un grand nombre seront révélées, c’est-à-dire les pensées de ceux qui ont douté. Ou bien : « Tu écarteras le glaive », bien plus : « Tu douteras aussi », parce que celle-ci a cru qu'il était le jardinier". (Diaterasson 17)

Par deux fois ici, St Ephrem fait dire à Siméon "tu écarteras le graive". Celui qui gardait le paradis et qui a été "enlevé par Marie" (cf. Gn 3, 24) nous y reviendrons plus bas. Et celui de la "négation". Beaucoup de questions se posent ici. De quelle négation veut-il parler ?

Le doute n'est pas la négation. Il la précède. On doute, on opère en quelque sorte un arbitrage puis l'on accepte ou l'on rejette. 

Et qui était ce jardinier ? La note du traducteur en bas de page nous dit ceci :

"Cf. Jn 20, 15. Dans les œuvres d’Ephrem, la confusion entre Marie, mère de Jésus, et Marie-Madeleine revient avec insistance. Cfr EC arm. V, 5 ; syr-arm. XXI, 27 ; Lamy I, 531-533 ; 535 ; 683 ; Hymnes arm. 5, 70-74 ; trad. Graftin, p. 231 (113-119) : « Il est évident que plus grande est la Virginité, et plus excellente que la Sainteté. Car c’est elle qui a enfanté le Fils, et qui de son sein lui a donné son lait. Elle s'est assise à ses pieds et les a lavés. Λ la croix, elle était près de Lui ; et à la résurrection, elle le vit. » Un ami, le R. P. Robert Murray , S. J., professeur d’ecclésiologie au Collège théologique de HeyThrop (Chipping Norton, Oxon, Angleterre), et qui prépare une élude sur la notion d’Église chez les Pères syriens du IVème siècle, a bien voulu me faire connaître les conclusions auxquelles le conduisait la constatation de la même confusion, soit dans la littérature gnostique (notamment chez les Valentiniens), soit chez quelques Pères de l’Église; ainsi Chrysostome, Hom. in Matth. 88, 2-3 (PG 88, 777- 778); Théodôret . Quaest. el respons. ad Orthodoxos 48.

Il est difficile de discerner toutes ces perspectives, n'est-ce pas ? À première vue, il semble que le saint diacre  relate plusieurs opinions qu'il a entendu. Nous remarquons également cette ambiguïté à la page 108 du Diatessaron (Sources Chrétienne V, 2, 3) , où saint Ephrem mentionne : "On dit encore que Marie aurait été perplexe" en parlant de ce qu'il vient de dire concernant les noces de Cana. Nous y reviendrons dans un billet ultérieur. 

Pourtant, il y a un élément de soutien clair dans cette citation. Comme nous allons le découvrir, cet appui a du sens et ouvre la voie à l'un des points cruciaux d'un paradigme. 

"Le glaive des chérubins mis à l'entrée du paradis à cause de la faute d'Eve, glaive que la nouvelle Eve a enlevé".

Toujours avec Saint Ephrem dans le 1er Hymne De Beata Maria (Lamy il, 521):

 "11 L'Arbre de vie qui se cachait au milieu du paradis a grandi en Marie."

Nous y voilà. Jusqu'à présent, seul le glaive de la Parole (Hébreux 4, 12) était mentionné. Cependant, nous découvrons à présent que saint Ephrem a également évoqué un glaive ailleurs dans les Écritures. De plus, il est noté que la Vierge Marie a "écarté le glaive" en tant que "nouvelle Ève", tandis que l'arbre de Vie a grandi en elle. L'arbre de Vie c'est le Christ.

Gn 3, 24 :

 Il expulsa l’homme, et il posta, à l’orient du jardin d’Éden, les Kéroubim, armés d’un glaive fulgurant, pour garder l’accès de l’arbre de vie.

Saint Hilaire de Poitier ouvre lui aussi une autre voie

 

Le Dictionnaire de Théologie Catholique nous présente une autre interprétation, voire une perspective différente. En effet, les apports de Saint Ephrem ne sont pas minimes, avec Saint Hilaire de Poitiers tout deux partagent une interprétation très proche. 

Les paroles suivantes ont été rapportées dans la "correspondance de Rome". Lors de la confirmation du titre de docteur, le défenseur de saint Hilaire au procès résume son exposé comme suit, selon l'explication donnée par dom Coustant : 

Correspondance de Rome, loc. cit., p. 236 : "Comme on dit dans la Genèse que Dieu plaça à la porte du paradis un chérubin armé d’un glaive de feu ; en outre, saint Paul ayant dit que les œuvres de tout homme seront éprouvées par le feu : les anciens Pères de l’Eglise crurent que personne n’entrerait au paradis qu’en passant par ce glaive. Ils enseignèrent en même temps que les saints ne seraient pas atteints par ce feu, dont la violence serait plus ou moins sensible en raison des souillures que chacun devrait expier. Puisque les Pères se croyaient obligés par l’autorité de l’Ecriture à reconnaître là une loi générale pour tous les hommes, quel tort a saint Hilaire de n’avoir pas établi une exception en faveur de la Mère de Dieu, et d’avoir cru qu’elle passerait par un feu qui devait tourner à la gloire des saints ? En se servant de cet exemple pour montrer l’immutabilité de la loi, il indique clairement qu’il considère la Mère de Dieu comme la plus sainte et la plus noble des créatures.".

Pour comprendre ce qui est en train de se dire, mettons une citation de saint Ambroise, lui aussi contemporain d'Origène afin d'éclairer d'avantage le verset en question. 

Saint Ambroise de Milan de la Virginité 5003 :
"Quel est ce glaive du Christ ? Celui dont il est écrit : « Je suis venu apporter le glaive sur la terre » (Mt 10,34). Il est un glaive dont il est écrit : « Ton âme elle-même sera percée d'un glaive » (Lc 2,35). Quel est ce glaive, quelle est cette épée ? Reconnaissez-la : « La parole, est-il dit, est acérée, puissante, plus pénétrante que le glaive le mieux affilé, pénétrante jusqu'à séparer l'âme et l'esprit, les membres et les moelles » (He 4,12). C'est une bonne épée, puisqu'elle sonde le coeur et le rein, discerne le mensonge de la vérité ; et ceux dont elle transperce l'âme, elle ne les tue pas, mais les garde."

Saint Hilaire et saint Ambroise.soulignent un élément crucial ici pour comprendre pleinement le message de La prophétie de Siméon – et toi, ton âme sera traversée d’un glaive – (Lc 2, 35). Le verbe dierchomai signifie "passer" ou "traverser", entre autres. L'idée ici est que le glaive "traverse" sans rencontrer de résistance. Saint Ambroise exclut de la mort ceux dont le glaive "transperce". Ainsi, seuls ceux dont le glaive pénètre et s'arrête meurent. Toutefois, selon saint Hilaire, ceux-ci peuvent être purifiés par le Feu. En suivant les enseignements de ces deux Pères de l'Église, on peut conclure que la Vierge Marie a traversé l'épreuve sans nécessité de purification. Ceci éclaire d'avantage le commentaire du défenseur de saint Hilaire.

Mais revenons à saint Hilaire :

Dictionnaire de Théologie Catholique : "Ces considérations suffisent pour montrer que la doctrine exprimée par l’évêque de Poitiers ne présente rien d’incompatible avec l’honneur de Marie. Mais est-il certain qu’en parlant du glaive qui devait transpercer l’âme de la Vierge, il ait eu réellement en vue le glaive de feu porté par le chérubin gardien de l’entrée du paradis ? En rapportant es paroles du vieillard Siméon, il a pu songer à l’interprétation d’Origène, In Lucam, homil. XVII, P. G., t. XIII, col. 1845, interprétation d’ailleurs inadmissible, d’après laquelle des légers mouvements de doute auraient traversé l’âme de Marie au temps de la Passion ; on comprendrait mieux alors pourquoi et comment le saint docteur a pu considérer la Vierge comme soumise à la rigueur du jugement divin. Quant au feu du jugement, destiné à purifier les âmes, expiandæ a peccatis animæ supplicia, il semble s’identifier avec le feu du purgatoire, mais jouant un double rôle, suivant une conception d’Origène, In Exod., homil. VI, 4 ; In ps. XXXVI, 1, P. G., t. XII, col. 354, 1337, qu’Hilaire aurait adoptée en la rattachant à l’enseignement de saint Paul, I Cor. III, 13, 15 ; d’abord, éprouver les âmes, et uniuscujusque opus quale sit ignis probabit ; puis, les purifiant quand il y a lieu : si cujus opus arserit, detrimentum patietur ; ipse autem salvus erit, sic tamen quasi per ignem. Voir t. V, col. 2242-2243."

Icone de l'arbre de Vie

Icone de l'arbre de Vie

Les chérubins et le chemin de l'arbre de Vie

 

Ap 2, 7 : "Que celui qui a des oreilles entende ce que l'Esprit dit aux Eglises: A celui qui vaincra je donnerai à manger de l'arbre de vie, qui est dans le paradis de Dieu."

La note de la bible d'Alexandrie nous informe que selon Philon1 et Origène2, ces chérubins, qui gardaient le chemin menant à l'arbre de la Vie, étaient au nombre de deux. Dans l'ancienne Mésopotamie, les chérubins, ailés, étaient des gardiens des lieux saints, ils étaient également présents pour veiller sur l'Arche d'Alliance, comme décrit dans Exode 25, 18-22. Ils occupaient une place spéciale dans le Saint des Saints, le lieu de rencontre entre l'homme et Dieu. Ils symbolisaient la présence de Dieu et la distance qui sépare l'humanité de sa divinité ; la gloire de Dieu se manifestait entre ces chérubins. Dans les Écritures, les chérubins sont chargés de protéger la sainteté de Dieu face à l'insouciance de l'homme déchu.

Origène Exhortation au Martyr 36 : "Réunissons donc tous nos efforts, non seulement pour nous préserver de l'apostasie, mais aussi pour ne pas rougir, quand les ennemis de Dieu croient nous abattre sous le poids de la honte. Surtout, pieux Ambroise, si, après avoir été reçu avec honneur par tant de vielles, vous vous voyez maintenant conduit en grande pompe comme victime, portant la croix de Jésus- Christ, et marchant sur ses traces, gardez-vous d'en rougir ; car Dieu vous précédera devant les magistrats et les rois, vous et votre rival dans la gloire céleste, Protoctète ; il mettra dans votre bouche des paroles de sagesse ; il sera martyr avec vous, vous qui accomplissez ce qui reste à souffrir à Jésus-Christ (Col 1, 24.) ; enfin il vous conduira vers ce paradis, séjour de la gloire de Dieu, en vous apprenant à éviter le chérubin et le glaive de feu qui s'agite sans cesse pour garder la voie qui conduit à l'arbre de vie. Cette voie, ils ne la gardent que pour en défendre l'approche à tous ceux qui sont indignes d'y pénétrer et d'arriver jusqu'à l'arbre de vie. Le glaive de feu écartera ceux qui, sur le fondement inébranlable, Jésus-Christ, auront élevé des édifices de bois, de joncs ou de paille (1Co 3, 12), et surtout, de tous les édifices, le plus prompt à s'enflammer, à réduire en cendres, l'édifice de l'apostasie. Quant à ceux que le glaive de feu ne saurait éloigner, parce qu'ils n'ont élevé aucun édifice qui ait pour le feu quelque affinité, le chérubin les recevra et les conduira vers l'arbre de vie, dans ce jardin de délices que Dieu a planté dans la terre d'Orient. Jésus accompagnera vos pas ; vous braverez le serpent qu'il a vaincu et foulé aux pieds, le serpent que, par Jésus, vous avez foulé aux pieds vous-mêmes, puisqu'il nous a donné le pouvoir de marcher sur les serpents et les scorpions, et de fouler aux pieds toute la puissance de l'ennemi sans en recevoir aucune atteinte."

NB. Aussi est-il fait mention ici et plus haut de ce qui deviendra ultérieurement la doctrine du purgatoire. Cela démontre que nos frères séparés ont également matière à réflexion sur ce sujet.

Contrairement à Saint Hilaire et à Saint Ephrem, Origène ne fait pas de lien explicite entre la Vierge Marie et le glaive de feu des chérubins. Cependant, il décrit le cheminement du martyr à travers la mort et le feu purificateur pour accéder à l'Arbre de Vie dans le paradis. l'Arbre de Vie symbolise la Croix du Christ. Un exemple concret de cette notion est celui du bon larron, qui, selon les paroles du Sauveur, entrera immédiatement au paradis ce jour-là. Voici comment Saint Ephrem le présente : 

Ephrem, écrits IV, 17 :
"Le bon larron avait ouvert son coeur à la foi; la foi s'en empara, et, l'attachant par des liens spirituels à l'arbre de la croix où il avait été suspendu pour ses crimes, elle l'emporta avec elle dans un jardin de délices. Dans la faim qui le pressait, dans cette soif de justice qui le dévorait, ce bois était pour lui le bois sauveur de l'immortalité; et, en mangeant le fruit qui pendait à ses rameaux, il a été l'image d'Adam notre premier père."

Icône du signe représentant Marie, nouvelle Arche de l'Alliance entourée de ses deux chérubins

Icône du signe représentant Marie, nouvelle Arche de l'Alliance entourée de ses deux chérubins

L'interprétation de la Charité et du Martyr

 

À partir du IVe siècle et encore plus au Vème siècle, de nombreux théologiens abandonnent la piste d'Origène et avancent l'idée que le glaive évoqué était en réalité les diverses épreuves que la Vierge Marie a dû affronter tout au long de sa vie, y compris celles rencontrées alors qu'elle était debout au pied de la croix. Les sources ne sont évidemment pas exhaustives, étant nombreuses, en faire l'économie a semblé préférable.

Saint Grégoire de Nysse Catena Aurea : 
"Cette prédiction concerne le Fils, mais elle s'adresse aussi à sa mère qui partage tous ses dangers comme toutes ses gloires, et le vieillard Siméon ne lui prédit pas seulement des joies, mais des afflictions et des douleurs: «Et votre âme sera percée d'un glaive»."

Augustin, lettres - LETTRE CXLIX. (Année 414)
33. "J'ai dit dans une autre lettre dont je vous envoie une copie mon sentiment sur ces paroles de Siméon adressées à la Vierge mère du Seigneur: «Le glaive transpercera votre âme;» vous avez. là-dessus jugé aussi comme moi. Les paroles qui suivent: «Pour que les pensées de plusieurs soient dévoilées » ont trait aux fourberies des juifs et à la faiblesse des disciples du Sauveur durant sa passion. Il est à croire que l'épée représente les douloureuses blessures faites au coeur maternel. Cette épée était dans la bouche des persécuteurs dont le Psalmiste a dit: «Une épée est dans leur bouche (Ps 59, 7).» C'étaient les enfants des hommes «dont les dents sont des armes et des flèches, «et la langue un glaive tranchant.(Ps 56, 5)» Le fer qui «transperça l'âme de Joseph» me parait signifier une dure tribulation, car il est dit clairement: «Le fer transperça son âme «jusqu'à ce que sa parole fût accomplie (Ps 104, 17-19)» c'est-à-dire que ses tourments durèrent jusqu'à l'accomplissement de ce qu'il avait prédit. De là lui vint sa délivrance et avec elle une grande situation. Mais de peur qu'on ne vît dans la prophétie accomplie un effet de la sagesse humaine, l'Ecriture sainte en rend gloire à Dieu selon sa coutume et ajoute aussitôt en parlant de Joseph: «La parole de Dieu l'embrasa.»"

De la Genèse 223 : 
35. "Or Dieu plaça à la porte du Paradis un " Chérubin avec un glaive flamboyant qu'il agitait, pour garder la voie de l'arbre de vie (Gn 3,24); " ou bien avec un glaive sans cesse agité. Le mot Chérubin, comme le veulent ceux qui ont traduit de l'hébreu les saintes Écritures, se rend par plénitude de la science. Quant au glaive flamboyant et toujours agité, il désigne les peines temporelles; car le propre du temps est une mobilité continuelle, et toute tribulation agit en quelque sorte comme le feu. Mais autre chose est de subir l'action du feu pour être consumé; autre chose de la subir pour se purifier. L'Apôtre dit: " Qui est scandalisé sans que je brûle (2Co 11, 29)? " Or ce sentiment le purifiait plutôt parce qu'il venait de la charité. Les tribulations que souffrent les justes ont aussi rapport à ce glaive de feu : " Car de même que l'or et l'argent sont éprouvés dans le feu, ainsi les hommes agréables à Dieu le sont dans le creuset de l'humiliation, " est-il dit (Si 2, 5) ; et encore " La fournaise éprouve les vases d'argile, et la tribulation, les hommes justes (Si 27, 6). Puis donc que Dieu corrige celui qu'il aime, et flagelle tout " enfant qu'il regarde d'un air favorable (He 12, 6 ), " selon ce que dit l'Apôtre : " sachant que la tribulation opère la patience, la patience l'épreuve (Rm 5, 3-4), " nous lisons, nous entendons et il faut croire que la plénitude de la science et le glaive flamboyant gardent l'arbre de vie. Personne donc ne saurait y arriver que par ces deux moyens, c'est-à-dire par le support des peines et la plénitude de la science."

 36. "Mais si pour parvenir à l'arbre de vie les hommes sont assujettis à porter le poids de l'affliction et de la douleur durant presque toute la vie présente, la plénitude de la science parait être le partage du petit nombre seulement; de manière que tous ceux qui arrivent à l'arbre de vie ne paraissent pas y atteindre parla plénitude de la science, encore que tous endurent le poids des peines marquées par ce glaive de feu toujours en mouvement. Mais en songeant à ce que dit l'Apôtre : " La plénitude de la loi c'est la charité (Rm 13, 10), " en remarquant aussi que la charité se trouve renfermée dans ce double précepte : " Tu " aimeras le Seigneur ton Dieu de tout ton coeur et de toute ton âme et de tout ton esprit, et tu aimeras ton prochain comme toi-même, " que, de plus, " ces deux commandements contiennent toute la loi et les prophètes (Mt 22,37-40), " nous comprenons sans aucune difficulté qu'on arrive à l'arbre de vie non pas uniquement par le glaive de feu agité en tous sens, c'est-à-dire par le support des peines temporelles, mais en outre par la plénitude de la science, c'est-à-dire par la charité, l'Apôtre disant : " Si je n'ai pas la charité je ne suis rien (1Co 13, 2-3)." 

Saint Ambroise de Milan - Commentaire de saint Luc : Mais de son côté Marie n'était pas inférieure à ce qui sied à la Mère du Christ : les apôtres avaient fui, elle se tenait devant la Croix, et contemplait d'un regard attendri les blessures de son Fils, attendant non la mort de son Enfant, mais le salut du monde. Peut-être aussi, sachant que la mort de son Fils était la rédemption du monde, elle, «la cour du Roi», pensait que sa propre mort pourrait ajouter quelque chose à la grâce faite à tous.

Saint Théophile Catena Aurea : Il ne convenait pas non plus que Marie fût au-dessous de ce qu'exigeait la dignité de mère de Dieu; aussi tandis que les Apôtres ont pris la fuite, elle se tient debout au pied de la croix, elle jette des regards pieusement attendris sur les blessures de son Fils, parce qu'elle considère non la mort de ce Fils chéri, mais le salut du monde. Ou bien encore, comme elle savait que la mort de son Fils devait être la rédemption du monde, elle croyait en formant ainsi la cour de ce divin Fils ajouter par sa propre mort au sacrifice qu'il offrait pour tous les hommes: mais Jésus n'avait pas besoin qu'on vînt lui prêter secours pour la rédemption du monde, lui qui a sauvé tous les hommes sans le secours de personne; ce qui lui fait dire par la bouche du Roi-prophète: «J'ai été comme un homme sans aide, libre entre les morts» (Ps 88,6). Il accepte le témoignage d'affection de sa mère, mais il n'implore le secours d'aucune créature.

- Saint Bède le Vénérable VIème  Catena Aurea : "Nous ne voyons dans aucune histoire que Marie ait fini ses jours par le glaive, d'ailleurs ce n'est pas l'âme, mais le corps qui est accessible aux coups mortels du glaive. Il nous faut donc entendre ici ce glaive dont le Psalmiste a dit: «Ils ont un glaive sur leurs lèvres (Ps 58,8), et c'est ce glaive, c'est-à-dire la douleur que Marie éprouva de la passion du Sauveur, qui transperça son âme. Car bien qu'elle sût que Jésus-Christ, comme Fils de Dieu, mourait parce qu'il le voulait, et qu'elle ne doutât nullement qu'il triompherait de la mort, cependant elle ne put voir crucifier le propre fils de ses entrailles sans un vif sentiment de douleur."

La prophétie de Siméon (Luc 2.21-35)
La Passion de Jésus et Marie 

 

Saint Augustin Premier sermon sur la purification de la Vierge 196 :
M
ais envisageons aujourd'hui Marie; et, témoins de sa fermeté et de sa constance, instruisons-nous et confondons-nous. Car voici les importantes leçons que nous pouvons tirer de la conduite de cette vierge, et que nous devons opposer aux sentiments lâches qui nous arrêtent : leçons que nous rendent sensibles les trois principales circonstances de ce mystère, c'est-à-dire le sacrifice que fait Marie du bien le plus précieux pour elle et le plus cher, qui est son Fils; le sacrifice qu'elle fait de toutes les douceurs de la vie, en acceptant le glaive de douleur dont Siméon lui prédit que son âme sera percée ; surtout le sacrifice qu'elle fait de son honneur, en voulant paraître, comme les autres femmes, impure et pécheresse, elle qui était l'innocence et la pureté même. Ah! Chrétiens, que n'ai-je le zèle des apôtres pour vous faire sentir, mais efficacement, mais vivement, toute la force d'un si grand exemple!  

Saint Augustin Premier sermon sur la purification de la Vierge  198 :
"Il n'importe : le zèle de la loi la presse : elle entre dans le temple, elle paraît devant Siméon, elle lui met son fils entre les bras; et par ces paroles prophétiques : Tuam ipsius animam pertransibit gladius (Lc 2, 35) ; elle reçoit de lui le coup mortel. Car ne pensez pas qu'elle n'en ait senti l'effet qu'au Calvaire, lorsqu'elle assista au crucifiement de son fils. Tout ce qu'elle doit souffrir alors, elle le souffre dès aujourd'hui, et dès aujourd'hui elle peut dire qu'elle est attachée à la croix." (198)

Augustin, lettres - LETTRE CXX. (Année 410) :
17. Dites-moi aussi comment vous comprenez les paroles du bienheureux Siméon, pour que je m'attache à votre sentiment. Étant venu au temple, par un mouvement de l'Esprit divin, afin devoir le Christ en face, d'après l'oracle de Dieu, et l'ayant reçu dans ses bras, il bénit le Seigneur enfant et dit à Marie: «Voici celui qui est établi pour la ruine et la résurrection de plusieurs en Israël, et il sera un signe de contradiction; un glaive percera votre âme pour que les pensées de plusieurs coeurs soient manifestées (Lc 2,34-35).» Faut-il croire que Siméon ait prophétisé ici quelque passion de Marie qui n'a été écrite nulle part? Annonçait-il à Marie les angoisses qui l'attendaient au pied de la croix où serait attaché Celui qu'elle avait enfanté, alors que, comme une épée à deux tranchants, la croix atteindrait en même temps son Fils selon la chair, en son âme maternelle?

Saint Augustin explique cette < distance > de façon subtile mais profonde, qui vaut surtout par la relation établie entre Cana et le Calvaire, que renforcera toute la suite du récit: Au moment de faire cette oeuvre toute divine, c'est comme si Jésus disait à sa mère : le pouvoir défaire ce miracle, je ne le tiens pas de toi, qui n'as pas engendré ma divinité (tu ne peux y être associée); mais quand la faiblesse de ma nature humaine, que tu m'as donnée, sera clouée à la Croix, alors je te reconnaîtrai et t'associerai à mon sacrifice.
(Sur Jn 8,9 — Pl 35,1455 ; Vives 9,327-328. Braun, qui cite ce passage, réfère aussi au commentaire de Thomas d'Aquin, qui va dans le même sens — Mère des fidèles, p. 53et57. De même Isaac de l'Etoile :Sermo 10) — Pl 194,1724;sc 130,228)

Marie, Réconciliation et Nouvelle Alliance : Une Lecture à la Lumière des Pères de l'Église

 

À la lumière de cette analyse, une convergence de concepts liés à deux événements majeurs se dessine : la crucifixion et la chute au jardin d'Éden. Les différents angles explorés dans cet article mettent en évidence que le commentaire d'Origène sur le "doute et le scandale de Marie" ne pouvait être maintenu, car il devient évident, à travers les interprétations des Pères de l'Église, que la prophétie de Siméon s'intègre dans le cadre plus large de la rédemption.

Pourtant, il est judicieux à ce stade de retourner à l'Écriture pour examiner s'il y a quelque chose que nous aurions pu négliger. En reprenant les paroles de Siméon, où il bénit le couple puis prend Marie à part pour lui révéler sa prophétie, il est difficile de percevoir en ces paroles un jugement défavorable à l'égard de la Vierge Marie.

Ainsi, reprenons : 

  • Marie bénie par Siméon... 
  • Jésus nouvel Adam
  • Marie nouvelle Eve
  • Marie mère de l'Arbre de Vie
  • Marie Arche de la Nouvelle Alliance
  • Marie martyr et charitable
  • Marie participante du sacrifice de Jésus

 

Effectivement, ces points abordés semblent prendre une tournure nettement catholique. Cependant, clarifions le contexte et concluons définitivement sur l'interprétation d'Origène en citant cet éminent docteur de l'Église, saint Irénée, évêque de Lyon (130-v. 208) :

« il n’est d’autre manière de délier ce qui a été lié sinon de reprendre en sens inverse les entrelacs du nœud. (…) C’est ainsi que le nœud de la désobéissance d’Ève a été défait par l’obéissance de Marie ; car ce que la Vierge Ève avait lié par son incrédulité la Vierge Marie l’a délié par sa foi » (Contre les hérésies 3,23).

Saint Ephrem nous invite à considérer Marie comme la Nouvelle Ève, celle qui "écarte le glaive", tandis que Saint Hilaire établit un lien entre la Vierge Marie et les Chérubins du jardin d'Éden.

Observons d'abord que les Chérubins, présents dans le Saint des Saints du temple et sur le propitiatoire de l'Arche d'Alliance, représentent le "lieu" de la rencontre entre l'Homme et son Dieu. Cependant, dans le jardin d'Éden, ils symboliseraient plutôt le "lieu" de la rupture lors de l'événement de la chute. Comment alors interpréter les propos de ces deux Pères de l'Église qui invoquent la Vierge Marie du pied de la Croix en ce lieu symbolique de la chute ?

Alors que la Croix représente la réconciliation de l'homme avec Dieu, envisager la présence de la Vierge Marie au jardin d'Éden aux côtés des deux Chérubins nous pousse à considérer son rôle en tant qu'Arche de la nouvelle Alliance. Lorsque saint Ephrem nous enseigne que "l'arbre de la vie a grandi en Marie", à la lumière de ce qui précède, il devient plausible de penser que c'est en prenant chair en Marie que Dieu a inauguré une nouvelle Alliance. Ainsi, par Marie, est symbolisée la réconciliation entre Dieu et l'humanité.

Son rôle dans l'histoire du salut est donc crucial, car elle est le lieu où la divinité et l'humanité se rencontrent de manière intime. Elle est la personne par laquelle l'unique médiation du Christ est possible. 

Ainsi, la naissance de Jésus en Marie marque le début d'une nouvelle ère dans la relation entre Dieu et l'humanité, où la réconciliation et la restauration deviennent possibles grâce à l'œuvre rédemptrice du Christ.

La Pietà de Michel-Ange

La Pietà de Michel-Ange

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Notes

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M
La citation de saint Augustin n'en est pas une. C'est une citation de Ambrosiaster, mais l'auteur citant une édition du XIIème siècle (!), la Catena Aurea, ne l'a pas remarqué. Pourtant, dès la Renaissance, cela commençait à être noté. L'auteur a donc un retard de cinq siècle en critique textuelle. La référence exacte est donc "Ambrosiaster, Qq. Nov. et Vet. Test., LXXIII", comme indiqué dans cet article auquel l'auteur répond sans daigner le mentionner (par crainte que son argumentaire ne tienne pas la comparaison ?) : https://parlafoi.fr/2023/12/01/immaculee-conception-innovation/<br /> <br /> L'auteur fait encore une erreur dès son premier titre, en prétendant que l'opinion origéniste selon laquelle l'épée était un scandale a été abandonnée après le Vème siècle, quant Théophylacte d'Ohrid, mort en 1126 et vivant donc bien après ce siècle, dit encore : <br /> <br /> "Et l’épée transpercera ta propre âme, c’est-à-dire celle de la Vierge. Peut-être s’agit-il de l’affliction qu’elle expérimenta lors de la Passion ; et peut-être désigne-t-il par l’épée l’offense par laquelle elle fut scandalisée quand elle vit le Seigneur crucifié. Car, peut-être, résonna-t-elle ainsi : Comment celui qui est né sans semence, qui accomplit des miracles, qui ressuscita les morts a-t-il pu être crucifié, subir les crachats, et mourir ?"<br /> <br /> Théophylacte d’Ohrid, Commentaire sur Luc 2.<br /> <br /> Par ailleurs, Reynolds, un historien catholique, dit qu'encore au IXème siècle cette opinion était discutée : Reynolds Brian K., Gateway to Heaven. Marian Doctrine and Devotion Image and Typology in the Patristic and Medieval Periods., Hyde Park, New York : New City Press, 2012, vol. I : Doctrine and Devotion, chapitre 8.<br /> <br /> Par ailleurs, l'interprétation selon laquelle le glaive désigne aussi la souffrance de Marie ne s'oppose pas à la doctrine réformée. Considérez par exemple comment le pasteur réformé Charles Drelincourt interprète le glaive :<br /> <br /> "Ce n’est pas qu’elle fût insensible à une affliction si amère ; car les liens qui serraient Jésus-Christ, torturaient cette âme innocente. Les clous qui perçaient les mains et les pieds de ce cher Fils, et la lance qui lui ouvrait le côté, transperçaient l’âme de cette tendre mère. Les épines qui déchiraient sa tête sacrée étaient autant de pointes en ses entrailles. Il ne découlait pas plus de sang des plaies de notre Seigneur que de larmes des yeux de la Vierge. Et avec le corps mort de Jésus, on ensevelit le cœur de Marie. Saint Siméon nous apprend assez l’extrémité de sa douleur, lorsqu’il lui prédit qu’une épée lui transpercera l’âme."
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M
Bonjour Maxime, je suis ravi que tu aies trouvé le chemin de mon blog. Je n'ai pas cherché à te cacher quoi que ce soit, mais je voulais avancer sur plusieurs articles avant de créer une page et de taguer ton site. J'ai effectivement passé du temps à rechercher les citations que tu remets en question, mais je n'ai rien trouvé, que ce soit lors de ma visite à la bibliothèque diocésaine ou lors de mon entretien avec un abbé prieur dominicain. Malheureusement, il semble qu'il n'y ait aucune trace de ces citations sur internet non plus.<br /> <br /> Concernant Théophylacte d'Ohrid, je maintiens qu'il n'est pas reconnu comme un Père de l'Église, ni même comme catholique. Il ne faut pas exagérer ! De plus, lorsque tu le cites, prends-tu en compte ses expressions telles que "peut-être" ?<br /> <br /> En ce qui concerne la souffrance de Marie, il est clair qu'il est question de sa "passion". Revenons sur quelques citations de saint Augustin qui ne sont pas exhaustives, cher Maxime :<br /> <br /> « Il est à croire que l'épée représente les douloureuses blessures faites au cœur maternel. Cette épée était dans la bouche des persécuteurs dont le Psalmiste a dit: «Une épée est dans leur bouche » Augustin, lettres - LETTRE CXLIX. (Année 414)<br /> <br /> Il n'est nullement question de doute ici.<br /> <br /> Quant au glaive flamboyant et toujours agité, il désigne les peines temporelles; car le propre du temps est une mobilité continuelle, et toute tribulation agit en quelque sorte comme le feu. (De la Genèse 223, 35)<br /> <br /> Ici, il est question du glaive des Chérubins, assimilé au feu. As-tu pris la peine de creuser un peu plus cette question ? <br /> <br /> « Le sacrifice que fait Marie du bien le plus précieux pour elle et le plus cher, qui est son Fils; le sacrifice qu'elle fait de toutes les douceurs de la vie, en acceptant le glaive de douleur dont Siméon lui prédit que son âme sera percée ; surtout le sacrifice qu'elle fait de son honneur, en voulant paraître, comme les autres femmes, impure et pécheresse, elle qui était l'innocence et la pureté même. » (Purification de la Vierge Marie)<br /> <br /> Elle est décrite comme "la pureté même" au moment de l'accomplissement de la prophétie. Par saint Augustin ! <br /> <br /> « Car ne pensez pas qu'elle n'en ait senti l'effet qu'au Calvaire, lorsqu'elle assista au crucifiement de son fils. Tout ce qu'elle doit souffrir alors, elle le souffre dès aujourd'hui, et dès aujourd'hui elle peut dire qu'elle est attachée à la croix. » (Purification de la Vierge Marie)<br /> <br /> Peut-on être "attaché à la croix" et douter en même temps ?<br /> <br /> Dans le souci de ne pas surcharger davantage cet article par respect pour mes lecteurs, je n'ai pas souhaité aller plus loin.<br /> <br /> Et puisque tu parle de Reynolds, parles-tu aussi de sa conclusion dans ton article ? Je te laisse en conmpagnie de cette citation : <br /> <br /> "En fin de compte la lecture de Marie comme deuxième Eve conduit à la conclusion que Marie, comme Eve avant elle fut crée sans péchés" Bryan K Reynolds "Gateway to Heaven: Marian Doctrine and Devotion Image and Typology in the Patristic and Medieval Periods: Doctrine and Devotion" P 330-348<br /> <br /> A bientôt !